dimanche 10 mai 2020

M



Le saule pleureur dans ma tête fait de l'ombre à mes rêves. Même le brise-vue du balcon flaire ce qui s'y cache; avec le bruit des camions qui passent, la pétarade d'un quad ou l'aboiement des chiens sans muselière. D'ailleurs, je les connais ces molosses à bave jaune. Ils lèvent la nuit en levrette, plantent leurs crocs dans des lueurs canines, hurlent à la mort sur le palier d'en face.
Oreilles droites, ils ont déjà mordu l'os de mon silence.
Et ce grillage qui de l'autoroute avance, avance avance. Le square est un atoll. Je l'imagine avec le palmier et les nymphéas en plastique du voisin. La lagune qui chante au pommeau d'arrosoir a perdu tes lèvres de corail. Combien sont-ils encore à jardiner le varech des pelouses sous-marines? A embrasser le sel des bouches d’égouts, corailleurs des trottoirs où les pirogues font place à des caddies qui s'entrechoquent?
Sur le parking de la mélancolie, pis-aller d'océans comme le fond des cages où sèche un linge pisseux, combien sont-ils à gonfler leurs voiles?
Mais j'attends les meutes avec une laisse de haute mer...Indifférent à l'auto-grue qui emmène les cadavres à la fourrière. Aux flaques sales qui toilettent mon petit carré de bitume.
Parfois, les branches tombantes de mon saule abritent les oiseaux morts. Leurs moignons d'ailes. Et le ciel, sodomite, viole des lumières groggy qu'il abandonne dans un néon. Il plante des nuits de gouttière, enferme ses vierges dans des flammes électriques sous les plafonniers. Demi-lune placentaire nourrissant les muettes, coupables de violence avec les heures nues de l'aube. Du rez-de-chaussée à l'ascenseur, j'entends les meutes. Avec les grues dans les bacs à sable, les bennes à ordures éventrées. Avec les abris-bus et leurs affiches de voyage derrière un océan de verre. Au fond de l'escalier, le cuir grené des tags tapisse les coups de griffes des portes sans serrures.
Comme l'aggravée et les poux des pelages étrangers suant l'hébétude et l'inconfort des chenils ténébreux.
Le saule pleureur fait de l'ombre à mes rêves. Et je traîne la patte. Cabot, honteux à glapir sous ta robe. Je m'y suis niché avec mes yeux d'épagneul comme d'autres y abandonnent leur collier de misère. J'ai beau gémir que je t'M comme la meute, je ne suis pour toi qu' un clébard en rogne. Un esprit de bas étage qu'on siffle à chaque coin de rue..

(texte Jonavin)

7 commentaires:

  1. Je goûte les mots, les images ... et j’aime beaucoup :-)
    •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

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  2. Il faut rendre à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui est à Dieu. (Quand les textes sont signés Jonavin, c'est mon frère).
    Par contre, je suis un spécialiste en vins et spiritueux parce que c'est mon métier donc je peux te faire goûter de belles choses.
    Tu comprends mieux le titre de mon blog ;)

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    1. Avec plaisir !
      Tu diras à ton frère qu'il écrit vraiment bien.
      •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

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  3. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  4. Dis donc... un peu glauque non, ce texte? Je préfère les saules rieurs en ces temps chahutés! ça a plus de chien. ;-)

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  5. Glauque, oui on peut le voir comme ça :)

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