jeudi 28 janvier 2021

Le jardin des amoureux

 


Dans le jardin des Amoureux,

 il y a cinq bancs. Des bancs à lattes ondulant tel des stores vénitiens. L’ombre y court en pointillé et tronçonne l’hiver quand le soleil vient à disparaître derrière les grilles.
Ce matin, un homme est venu accrocher un cadenas. Car ici, on enferme l’amour à secret, on le verrouille dans un trou de serrure en y jetant la clé. C’est un cadenas en forme de cœur avec les initiales A et Z gravés maladroitement. Antoine et Zoé ? Comme le début et la fin d’une histoire? L’accroche-cœur des sentiments fanés à la rouille du temps…
L’homme s’est assis là, sans bouger, un bouquet de fleurs à la main. Qu’est-ce qui le distingue des autres finalement ? Son côté gauche et malappris, sa façon dégingandé de mouliner ses bras avec le haut des épaules ? Ou son air passe-partout, huissier de son infortune à crocheter les plus improbables serrures ?…D’accroche-cœur, il n’a qu’une mèche rebelle qu’il colle avec le bout de ses doigts mouillés. Un épi qui tranche avec l’inflorescence des arbustes parfumés autour de lui. Il sourit. Mais son sourire a l’image nuisible du chardon au milieu des fleurs séchées. Pourtant, ce sourire respire l’authenticité. Comme un panier rustique garni d’immortelles. La valeur d’une rose qui ensoleille la brique sombre de ses yeux. L’innocence.
Il attend. Une heure, deux heures. L’amour a souvent besoin de se refaire une jeunesse. Celle qu’il aime doit avoir le piquant du houx. La méchanceté du baiser dans le fruit défendu : des lèvres rouges, ornementales et décoratives. Des cheveux en botte de blé vert. Des pieds d’alouette. Et le charme rétro d’un pot-pourri aux senteurs rose-pivoine.
Dans le jardin des Amoureux, il y a cinq bancs. Zoé ne viendra pas. L’homme le sait. Mais les fleurs ont le pouvoir d’embellir. Le cadenas, c’est comme une fessée d’orties. Ça rougit là où ça fait mal. Puis la douleur passe. Pas de larmes, les fleurs séchées se cueillent toujours le matin, après l’évaporation de la rosée. Alors demain il ira suspendre ses sentiments à l’abri de la lumière. Pour en garder la couleur naturelle. Et surtout, débarrasser les épines de son bouquet ligaturé d’un brin de raphia.
L’homme se lève sans jeter un regard sur le cadenas. Il garde son bouquet à la main. Il se dit qu’aujourd’hui il fait un temps superbe…
(texte Jonavin)

mardi 26 janvier 2021

drakkar noir






Le dimanche soir
Je croyais que j'avais écumé
le cœur de mes pensées
Comme un coefficient de marée
Juste pour croire
Aux variations, aux courants marins
aux risques des tempêtes
Dans les fjords les plus isolés
Ecouter l'éternité déshabiller
Une île de pluie
nattée en chignon
dessinée
Comme un océan qu' on dénude
Une chevelure dont on se décoiffe
rejetant par saccades le catogan
des vagues éphémères que le vent ébroue
Avec la mode du tartan
Un soupçon de tourbe
Un or à reflets verts comme les algues séchées
que l'océan disperse
Des épices de poivre noir, d'agrumes et d'embruns
quand la cendre volcanique déborde
sur les orgues de baltique
Une mer démontée
L'invasion 
drakkar noir dans la brume
viking de la mer
Envoûté la première fois
dans le sel et la fumée celte
Flotte
Des odeurs de cédrats confits, de mangue et d' iode
Une île de beauté
Quand le silence bataille l 'amertume 
pactise avec les parfums boisés
Un dram hors du temps
même mesure, même latitude, même magie
Des nuages de fumée font surgir du néant
l' expulsion d'une gaélique
Tourné vers la haute mer
L' attaque est explosive, son degré d'alcool
à la puissance volcanique des montagnes noires
Lave en fusion brute, qu'un trait d 'eau adoucit
avec la quiétude d'une mer bretonne

(dram : unité de mesure)

jeudi 14 janvier 2021

La bicyclette





 Sur le porte-bagages de mes yeux, j'ai souvent emporté de lourdes valises. Mais ce soir, promis, une sacoche suffira. Je n'ai pas sommeil. Je quitte doucement la chambre, sa tristesse renfermée. De mes bandages à qui j'envoie un pneu ballon, suppure toujours cette plaie profonde. Illusions déçues, mes souvenirs vont comme la pensée. Pourtant je sais ma vie boiteuse.

La béquille de mes angoisses sur laquelle m'appuyer. Quand ce qui vous a saigné ne vous donne plus la force de faire la roue...il faut partir. Se pendre à la sonnette d'alarme. Mériter la potence.

Alors je vole à bicyclette, l'endroit où nichent les hirondelles comme la patrouille en leggins et casquette plate de la rue Nélaton. Mes mains serrent fort les poignées. L'amour sans frein nous oblige parfois à rentrer la tête dans les épaules, disais-tu. Maintenant c'est une certitude ; il peut aussi tuer. Ce soir, je sens un vent printanier rafler tout ce qui traine. Rouler des patins aux bouches d'égoût. Il gifle, gémit, rase les trottoirs mais je n'ai plus peur.

Tiens, le magasin de cycles  a du mettre les saisons en location. Elles emportent à la chaîne ce temps qui déraille. C'est juillet, il pleut. Le monde fait tourner ainsi sur les selles, les hommes, bons rouleurs qui luttent contre la montre. Ceux qui s'enfuient sous des feux de peloton. Les pinces à vélo, les capuchons, tous ces petits détails qui nous semblent souvent  accessoires. Dans une vitrine, vient se refléter l'ombre d'un tan -sad où j'imagine un couple en tandem, un soleil donnant la main à l'herbe verte. Un pique-nique au bord de l'eau. Une motocyclette de 1942. Sur la place où tant de fois j'ai acquis pignon sur rue, ne reste que des maisons à volets clos. Une solitude méprisante. Des papillons noirs. Un peu de ton âme aussi, dans l'échappée des rues sombres. Le Vel 'd'HIV où j'ai perdu ta main. Dissolution des mœurs, peut-on coller une rustine à ce qui n'existe plus? Moi, j'ai levé les cintres, oublié la clavette sur cette fièvre en plateau qui, toutes les nuits câble encore un "dépêche-toi". Sauf qu'aujourd'hui, aucun regret ne se pleure sans briser des gaines. Même le vent, soudain se dégonfle, je me cramponne à ma bécane. Des bouffées d'air glacent mon dos trempé. Je vole ta silhouette.

A la fourche d'un platane, je me raidis. D'ici, on peut viser à plein guidon la route qui zigzague. Mais à ceux qui s'aiment en rayons, nul doute qu'elle doit déjà  disparaître hors cadre. J'entends claquer le garde-boue. Et cette note de pédale, infatigable, qui monte en danseuse toutes ces heures épuisées ! Apprends-moi de nouveau les sentiments à la manette, la peur de tomber, le rire des enfants...Je suis descendu de ma bicyclette. La pluie mouille mon visage.

Tu ne reviendras pas...

(texte Jonavin)

samedi 9 janvier 2021

Du soleil dans les platanes


 Je les trouvais beaux les platanes à Château-Gontier.

A cette époque, je roulais l'automne d'Angers à Laval.
Quelques jours pour la foire aux vins.
Quittant femme et enfant, la banlieue parisienne.
Je logeais, chaque année en anjou, chez mes parents parfois ma grand-mère.
J'avançais dans la maturité,
Sur la route, j'm'en disais des choses, en regardant la mayenne angevine.
Cette nature insolite,
 « Une longue Démonstration c'est un sujet qui n’en demande pas plus au risque de s’éparpiller dans des descriptifs trop longs qui pourraient gêner le rêve"
Des instants courts qui ciblent,
« Le bonheur »,
Je le voyais comme une histoire en mouvement…
Une façon de voir la vie de l'autre côté,
Mais dans mon imagination, j’avais beaucoup de temps mort et je savais qu'il fallait davantage pour réveiller une dormeuse.
J’avais bien commencé par le premier regard mais je n’étais pas allé jusqu'au bout.
Cependant, elle avait marqué mon esprit.

jeudi 7 janvier 2021

Spartacus acte III


 8 minutes magiques, Ludmila Semenyaka avec la musique envoûtante d' Aram Khatchatourian

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